Parce que tu avais écrit
Parce que tu avais écrit un jour de cet an 2000 passé, si longtemps craint, si longtemps redouté, une lettre brouillonne de ta patte serrée. Déjà, ton écriture était devenue à peine lisible, hiéroglyphes nouveaux abîmés par la maladie.
"C'est la faute de James", disais-tu en parlant de ce Parkinson qu'on t'avait diagnostiqué en 1997.
Et si longtemps, tu as espéré...
Tu t'es battu, tu as trop résisté, tu t'es usé - tu nous as usés aussi, malgré toi.
Et finalement, James a eu le dernier mot. Comme toujours. On n'en guérit pas, de ces maladies-là. On n'en meurt pas directement non plus.
Elles effritent les humains, elles les épuisent.
Mais en 2000, tu écrivais encore. En 2000, tu pouvais parler, articuler même soumis à des traitements médicaux qui t'ont à demi achevé plus d'une fois.
Tu avais écrit cette lettre que j'ai récemment retrouvée, truffée de tirets, de virgules et parenthèses, digressive à souhait. Tu me répondais, je crois, et entretenais un dialogue que nous avions commencé de ci de là, quand je suis parvenue à l'âge adulte.
J'ai eu du mal à te relire.
Le sens était là mais caché derrière des digressions, des phrases sans verbe et d'autres tournures qui te plaisaient mais n'en étaient pas pour autant très compréhensibles.
Toi, l'autodidacte ou presque, tu n'avais pas pu faire de longues études. Et souvent, quand tu rédigeais, tu me demandais, si j'étais présente, de corriger tes phrases trop longues (et ce qu'elles étaient longues! et emberlificotées!). Mais tu aimais écrire.
Puis, après avoir parlé très honnêtement de ta foi, de tes croyances et de tes doutes aussi, tu terminais ainsi :
En mémoire de mon père 1940-2017
Texte Leya - photos 2017/2018 LeyArts photos
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